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La valeur éducative de l’espéranto : Tolkien prend la parole dans The British Esperantist 1933

Oronzo Cilli — 2014 — traduit de l’anglais par Vivien Stocker — 2015
Notes de lectureNotes de lecture : En tant que présentations ou compilations, ces articles sont les plus accessibles à tous les lecteurs. Aucune connaissance sur J.R.R. Tolkien n’est requise.

La relation la plus connue entre Tolkien et l’espéranto est une série d’extraits d’une lettre publiée en mai 1932 dans la revue The Bristish Esperantist. En réalité, le merveilleux mensuel de l’Association britannique d’espéranto contient au moins deux autres informations utiles pour reconstruire les rapports entre le futur auteur du Hobbit et du Seigneur des Anneaux et la langue artificielle inventée par Ludwik Lejzer Zamenhof.

Nous présentons ici les résultats d’une recherche sur cette revue espérantiste britannique, qui révèle deux épisodes impliquant directement J.R.R. Tolkien : le XXIVe Congrès britannique d’espéranto, en avril 1933, et le manifeste « The Educational Value of Esperanto » (La valeur éducative de l’espéranto) signée par vingt personnalités britanniques en mai de la même année — parmi lesquelles…

L'espéranto

L’espéranto fut créé entre 1872 et 1887 sous la forme d’une langue planifiée et développée par Ludwik Lejzer Zamenhof, un ophtalmologiste polonais d’origine juive. Le premier ouvrage, Unua Libro (1887), la présente comme la Lingvo Internacia (langue internationale), mais elle devint bientôt l’espéranto (« celui qui espère », « l’espérant ») d’après le pseudonyme Doktoro Esperanto utilisé par Zamenhof lui-même. Cette langue nouvelle fut créée dans l’intention de faire dialoguer des peuples différents et de développer la compréhension et la paix au moyen d’une langue seconde qui appartiendrait à l’humanité, et non à un seul peuple : projet fondé sur la Déclaration de Boulogne, adoptée au terme du premier congrès international d’espéranto tenu à Boulogne-sur-Mer en France, en 1905, et soutenu par l’avocat français Alfred Michaux ; ainsi que sur le Manifeste de Prague de 1996.

Chaque année depuis 1905, l’Association mondiale d’espéranto (Universala Esperanto-Asocio ou UEA) organise le Congrès mondial ou Universala Kongreso de Esperanto (UK) en espéranto, qui se déroule habituellement en juillet ou août, avec la participation de conférenciers et de membres de la communauté espérantiste. Le dernier Congrès s’est tenu en 2013 à Reykjavík en Islande ; les prochains se tiendront à Buenos Aires en Argentine en 2014, puis à Lille en France en 2015 (lequel coïncidera avec le centenaire de sa création).

L’UEA, fondée en 1908 par le journaliste suisse Hector Hodler, est la principale organisation internationale d’espérantophones. Son siège social est à Rotterdam, mais elle possède aussi un siège auprès des Nations Unies, à New York. L’UEA compte des membres dans 120 pays et entretient des relations officielles avec les Nations Unies et l’UNESCO, bénéficiant ainsi d’une centaine de structures nationales à travers le monde.

Parmi les organisations nationales, la britannique, l’Esperanto-Asocio de Britio (BEA), est l’une des plus anciennes. Elle fut fondée en 1904 et devint par la suite une division nationale en 1933. Dès le départ, elle lança son propre périodique : The British Esperantist. Son siège est à Londres1), et elle est l’association d’espéranto la plus importante du Royaume-Uni, qu’elle représente à l’UEA.

Mais comme ce fut le cas dans d’autres pays, des associations d’espéranto se formèrent bientôt dans d’autres villes du Royaume-Uni. À Oxford, où Tolkien vivait et enseignait, une association fut créée le 23 janvier 1930.

1930 — Oxford et le Congrès mondial d’espéranto

En 1930, le lieu choisi pour accueillir le 22e Congrès mondial d’espéranto est précisément l’Université de la ville d’Oxford2). La semaine du 2 au 9 août est choisie et c’est en janvier de cette année-là précisément, comme le relate le mensuel « International Language » de mars, que l’Université d’Oxford emboîte le pas. Le 23 janvier, l’Association d’espéranto de l’Université d’Oxford est créée avec une classe de quinze étudiants venus de différents collèges. L’association reçoit une reconnaissance officielle des autorités universitaires3).

Participants au congrès, de gauche à droite : Prof. Finlay,
Emilja Heruchin (petite-fille de Ludwik L. Zamenhof), Dr. Gregg, Noel Baxton (parlementaire anglais).

Participants au congrès, de gauche à droite : Prof. Finlay,
Emilja Heruchin (petite-fille de Ludwik L. Zamenhof), Dr. Gregg, Noel Baxton (parlementaire anglais).

Le président du Congrès mondial est alors Bernard Long, Bachelor of Arts et conseiller au sein du BEA, et le vice-président, W.E. Collinson, professeur d’allemand et maître de conférences d’espéranto à la chaire Buchanan de l’Université de Liverpool.

Dans le programme de la semaine de conférences, la session du Comité central international est prévue pour l’après-midi du samedi 2 août, suivie par la session du Conseil Général. Le même soir, les participants sont invités par le maire d’Oxford, William Stobie. Le dimanche matin, après la messe4), vient le moment des photos. La plus fameuse est celle du groupe des participants au Congrès de Cambridge de 19075).

Photographie des participants au Congrès mondial de Cambridge.

Photographie des participants au Congrès mondial de Cambridge.

Suivent une session d’après-midi et une soirée libre. La première session de travail a lieu le lundi matin ; l’université d’été s’ouvre l’après midi avec la première leçon, suivie de rencontres techniques et d’une soirée dansante en costumes nationaux. La réunion de l’UEA se tient le mardi matin, suivie de nouveau l’après-midi par l’université d’été et les rencontres techniques. La soirée est dédiée à la réunion de propagande publique.

Le mercredi matin s’ouvre avec la deuxième session de travail ; l’après-midi, retour de l’université d’été et des rencontres techniques. La soirée voit la moitié des congressistes participer à divers jeux et l’autre moitié assister à un concert. Le jeudi matin est consacré aux sorties, au libre choix des participants qui se voient proposer : a) une visite du château royal de Windsor et un voyage sur la Tamise sur des bateaux particuliers ; b) une excursion à Banbury, Kenilworth, Warwick, Stratford-on-Avon et Broadway ; c) une excursion à Newbury, Andover, Salisbury, Stonehenge, Marlborough et Wantage ; ou enfin une excursion à Cirencester, Stroud, Gloucester, Cheltenham, North Leach et dans les collines des Cotswolds. Le soir, les auditeurs du concert de la veille participent aux jeux et les joueurs vont au concert. Le vendredi matin, la troisième session de travail a lieu et la soirée de termine par un bal. Le samedi matin, le congrès se clôt avec la dernière session.

Quelques participants éminents : Feliks et Lidia Zamenhof, à droite Paul Blaise.

Quelques participants éminents : Feliks et Lidia Zamenhof, à droite Paul Blaise.

Le XXIIe Congrès d’Oxford compte 1 211 participants issus de 29 pays différents. La part du lion revient évidemment à l’Angleterre, avec 623 participants, toutefois il y a aussi 6 australiens, 9 japonais mais seulement 8 italiens6). Les délégations reçoivent aussi la broche officielle en forme de pentagone (pour symboliser les cinq continents) spécialement créée pour le Congrès. La broche est émaillée de la Verda Stelo (« étoile verte » en espéranto), symbole des espérantistes, dont le vert représente l’espoir et l’étoile les cinq continents, surplombant l’image de fond représentant l’Université d’Oxford. Les quatre premiers côtés de la plaque portent le message « XXII Universala Kongreso de Esperanto » et le bord inférieur la mention « Oxford 2—9 August 1930 » glacée sur fond vert.

Verda Stelo

1930 — Et J.R.R. Tolkien ?

A la lumière ce qui a été rapporté jusqu’ici, il est naturel de se demander si, parmi les participants, il y avait aussi le professeur J.R.R. Tolkien. Eh bien, j’ai consulté personnellement la liste des 1 211 participants (publiée dans le mensuel « International Language » entre janvier et octobre 19307) — à l’exception du numéro de septembre — et éditée par Cecil Charles Goldsmith, le secrétaire de la BEA) ainsi que les actes du congrès publiés la même année8), et le nom de J.R.R. Tolkien n’apparaît pas.

Cela ne signifie pas pour autant que Tolkien n’y prit aucune part, mais il est possible qu’il n’ait participé qu’à quelques activités plutôt qu’à la semaine entière de conférences. L’hebdomadaire catholique « The Tablet » écrit qu’« en lien avec le Congrès mondial d’espéranto d’Oxford, un sermon dans cette langue a été prêché pour la délégation catholique dans l’église dominicaine des Blackfriars par le père Gaffney, O.P.9) ». Il est possible que la foi, l’intérêt pour cette langue et, dernier élément mais non le moindre, le couvent dominicain des Blackfriars l’aient amené à participer au service religieux.

Il était familier du couvent dominicain des Blackfriars. Le samedi 19 mai 1945, Tolkien sert une messe en ce couvent. On l’apprend dans une lettre qu’il envoya le 15 mai à Mrs. Michal Williams, le jour de la mort de son mari Charles, après une opération. Charles Williams était un écrivain et poète anglais, membre historique des Inklings avec C.S. Lewis et J.R.R. Tolkien.

Il écrit : « le père Gervase Mathew10) dira une messe aux Blackfriars11) samedi à 8 h, et je l’assisterai ; mais vous serez bien sûr tous les trois dans mes prières dès maintenant et pour toujours — pour ce qu’elles valent12)… »

Malheureusement, nous n’avons de confirmation dans aucun livre publié ni dans aucune lettre de l’auteur anglais de sa participation à la cérémonie religieuse du 9 août 1930. La seule certitude est que Tolkien était évidemment au courant du congrès, ainsi qu’il l’écrit dans l’introduction d’« Un vice secret », incluse dans le recueil édité par fils Christopher sous le titre Les Monstres et les critiques et autres essais. Un texte dans lequel Tolkien traite brillamment du sujet des langues artificielles et leur prétendue « inutilité », et particulièrement du plaisir particulier pris par leurs créateurs et quelques « initiés ». Cependant, il est bien connu que le texte n’est pas daté, et les hypothèses sur l’année de sa rédaction vont de ceux qui le font remonter à 1931, à cause de l'incipit, à ceux qui affirment qu’il a été écrit peu de temps après le Congrès de 1930 puis révisé en partie pour une conférence ultérieure.

Le professeur Tolkien écrit dans son discours d’ouverture :

« Peut-être certains d’entre vous savent-ils qu’il y a au moins un an s’est tenu à Oxford un congrès d’espérantistes. Peut-être l’ignorez-vous. Personnellement, je crois en une langue « artificielle », en tout cas pour l’Europe, c’est-à-dire que je la crois souhaitable, comme étant la condition préalable nécessaire à l’unification de l’Europe, avant qu’elle ne soit engloutie par la non-Europe, ainsi que pour beaucoup d’autres bonnes raisons. Je la crois possible, parce qu’à ma connaissance, l’histoire du monde semble montrer à la fois une affirmation du contrôle de l’influence des hommes sur l’incontrôlable et un élargissement progressif du champ de langues plus ou moins uniformes. En outre, j’aime particulièrement l’espéranto, notamment parce que c’est en définitive l’œuvre d’un seul homme qui n’était pas philologue et c’est donc en quelque sorte « une langue humaine exempte des inconvénients dus à de trop nombreux cuisiniers successifs », ce qui est la meilleure description de la langue artificielle idéale (dans un sens particulier) que je puisse donner.
La propagande en faveur de l’espéranto a sans doute abordé tous ces points ; je ne saurais le dire. Mais peu importe, car mon propos n’a absolument rien à voir avec ce genre de langue artificielle13). »

À l’heure actuelle, en l’absence de documents, chacune des hypothèses est plausible. Mais la relation entre Tolkien et l’espéranto ne s’arrête pas là.

1932 — Le Tolkien « espérantiste »

S’il n’y a aucune confirmation de sa participation au congrès de 1930, bien que l’auteur de ces lignes incline à penser qu’il était présent, il existe en revanche un article bien connu affirmant son « engagement » en faveur de la langue espéranto. Il s’agit d’une lettre que Tolkien envoya au secrétaire du comité éducatif de l’Association britannique d’espéranto après que celui eut nommé Tolkien au Bureau des Conseillers Honoraires. Un extrait de cette lettre fut publié en mai 1932 dans The British Esperantist, sous le titre A philologist on Esperanto14) (Un philologue à propos de l’espéranto).

A Philologist on Esperanto

Tolkien écrit qu’il s’intéresse à la langue internationale espéranto « en tant que philologue, et comme tout philologue devrait l’être », la considérant comme « un phénomène linguistique important et intéressant » pour lequel il éprouve de la sympathie.

Il affirme ne pas être un espérantiste pratiquant15) comme, selon lui, devait l’être dans une certaine mesure un conseiller (faisant par là référence à sa « récente » nomination). Il admet connaître la langue, « comme dirait un philologue », pour l’avoir apprise quelque vingt-cinq années auparavant (vers 1907, la lettre datant de 1932), affirme qu’il n’en a pas oublié depuis la grammaire ni la structure, et qu’ayant lu beaucoup de textes pendant un temps, il a une certaine familiarité avec ce genre de langues et se sent donc « assez compétent pour avoir une opinion à propos de ses défauts et qualités ». Après quoi il s’estime toutefois incapable de contribuer de façon utile autrement qu’en tant que philologue et critique.

Cependant, le point de vue de Tolkien sur la situation de la langue internationale est que de tels services, aussi bons soient-ils en théorie, sont indésirables en pratique, et que la technique philologique est devenue « un obstacle et une nuisance ». Mais c’est précisément la plus forte raison qu’il trouve de soutenir l’espéranto.

L’espéranto, continue Tolkien, lui semble sans aucun doute « en tous points supérieur à tous les autres concurrents actuels », ce qui lui a déjà donné la première place, lui a gagné la plus large mesure d’acceptation pratique, en plus d’avoir développé l’organisation la plus avancée.

Tolkien le compare à une église orthodoxe confrontée non seulement à des incroyants, mais aussi et surtout à des schismatiques et des hérétiques, « une situation, dit-il, prédite par le philologue. Mais en admettant un certain degré de simplicité, d’internationalité et (j’ajouterai) d’individualité et d’euphonie — ce à quoi l’espéranto parvient certainement — il me semble évident que le problème le plus important à résoudre pour une langue internationale en devenir est celui de sa diffusion universelle. Un outil inférieur qui a une chance d’y parvenir en vaut une centaine théoriquement plus parfaits ». Pour le philologue oxonien, le goût et l’invention linguistique ne présentent aucun caractère définitif. « La beauté inventive des détails a relativement peu d’importance, au-delà du minimum nécessaire ; et les théoriciens et inventeurs (dont je serais enchanté de faire partie) ne font que retarder le mouvement, s’ils sont disposés à sacrifier l’unanimité à l’“amélioration” ».

Tolkien admet aussi que l’amélioration technique du système, en vue d’une plus grande simplicité et clarté de sa structure ou d’une plus grande internationalité, tend à détruire l’aspect « humain » ou esthétique de l’idiome inventé. « Cet aspect apparemment malcommode semble être largement sous-estimé par les théoriciens ; mais j’imagine qu’il n’est pas réellement malcommode, et qu’il aura au final une grande influence sur la question fondamentale de l’acceptation universelle ». Vers la fin, il cite le N**, probablement le novial16), qu’il dit aussi ingénieux et plus simple que l’espéranto, mais hideux parce que « produit en usine », « créé à partir de pièces détachées » et « sans aucune lueur de l’individualité, la cohérence et la beauté qui apparaissent dans les grands idiomes naturels, et qui se révèlent à un niveau considérable (probablement au plus haut niveau possible dans une langue artificielle) en espéranto — preuve originale du génie de l’auteur ».

Il conclut par un conseil à tous ceux qui ont eu du temps ou de la volonté à consacrer au mouvement pour la langue internationale : « Soutenez loyalement l’espéranto ».

Voilà donc tout ce que l’on sait du Tolkien espérantiste, et dont on trouve un approfondissement dans l’essai d’Arden R. Smith et Patrick H. Wynne, Tolkien and Esperanto (« Seven: An Anglo-American Literary Review », no 17, 2000, p. 27—46), lequel demeure aujourd’hui le travail le plus complet et exhaustif sur le sujet. Mais une recherche plus approfondie dans le mensuel de la BEA révèle deux autres éléments intéressants pour les étudiants et les passionnés de Tolkien et de l’espéranto.

1933 — Tolkien espérantiste et protagoniste

L’activité espérantiste de Tolkien ne s’achève pas en 1932, au témoignage de deux numéros de The British Esperantist de 1933.

Le nom du futur auteur du Hobbit et du Seigneur des Anneaux est présent dans le numéro de janvier 1933, cité dans l’annonce du XXIVe Congrès britannique d’espéranto, se déroulant la même année, à Pâques, dans la ville d’Oxford.

Sur la page du magazine Esperantist, on lit :

24e CONGRÈS BRITANNIQUE D’ESPÉRANTO
Oxford-Pâques, 1933.
Mécènes : H.R.H. Duc de Connaught, K.G.; Monsieur le Maire d’Oxford (Alderman G. H. Brown) ; Sir Michael Sadler, K.C.S.I., C.B. ; Professeur Braun Holtz ; le Conseiller Rev. John Carter, Dr. A.D. Lindsay, C.B.E., Maître du Balliol College, Professeur J.R. Tolkien, et A. Baratt Brown, Principal du Ruskin College17).

Hôtel Randolph

Hôtel Randolph.

Tolkien s’avère ainsi être l’un des soutiens du congrès aux côtés d’autres personnalités oxoniennes de l’époque.

Le congrès se tient à l’hôtel Randolph, sur la Braumon Street à Oxford et, pour l’occasion, des cours d’espéranto sont aussi organisés à la manière de celui rapporté par « The Tablet » du 25 mars 1933 : « Suite au Congrès britannique d’espéranto qui se tiendra à Oxford durant la semaine de Pâques, la Ligue anglaise des espérantistes catholiques annonce que le père Andrew Cseh donnera un bref cours d’instruction en espéranto. Le père Cseh vient de Hongrie, et son système d’enseignement a connu un succès remarquable18). »

Le programme du Congrès du vendredi 14 avril prévoit l’ouverture des inscriptions à 9h du matin suivi d’une promenade à Oxford le matin et l’après-midi et, le soir, une leçon à l’essai d’espéranto. La réunion annuelle de la BEA se déroule le samedi 15 avril au matin. L’après-midi, enseignants et autres passionnés d’éducation et d’espéranto se réunissent pour une conférence sur le thème de « La position actuelle de l’espéranto dans les écoles en Grande-Bretagne ». L’orateur de la réunion est Montagu Christie Butler19), président de la BEA, avec Novell Smith, M.A. (ancien doyen de la Sherborne School) comme président de session. Le dimanche 16, après la messe de la chapelle de New College dite par W. Severn, les participants du Congrès se prêtent à une séance photo. L’après-midi est destiné à des travaux de groupe et la soirée à un concert. Le dernier jour, lundi 17, est entièrement consacré à des excursions à Kenilworth, Warwick et Stratford. Se déroulent également les examens pour les diplômes I.B.E.A. et L.B.E.A. Le Secrétariat du Congrès était alors dirigé par J.F. Brendel, 89 Dene Road, Headington, Oxford. Toutes les soirées du Congrès sont organisées par l’Association oxonienne d’espéranto.

Nous ne savons pas si Tolkien fit un discours au Congrès et le mensuel d’espéranto ne nous aide pas à en savoir plus mais, s’il l’a fait, rien ne nous interdit de supposer que le texte utilisé pour le discours pouvait justement être Un vice secret. Mais ce n’est rien de plus qu’une hypothèse parmi d’autres.

La seconde référence à Tolkien, peut-être plus importante encore que la note publiée en 1932, se trouve dans le numéro de mai de la même année (1933) du British Esperantist et a probablement un lien étroit avec le Congrès du mois d’avril précédent.

Dans le numéro de mai, en première page, se trouve un texte intitulé « La valeur éducative de l’espéranto ». Il fut écrit un mois avant, en avril, probablement à la fin du XXIVe Congrès dont nous venons de parler car, le samedi, il était prévu une conférence sur « La position actuelle de l’espéranto dans les écoles en Grande-Bretagne ». Et ceci confirmerait la présence de Tolkien à ce congrès. On y lit que :

« en vue du besoin important, dans les conditions actuelles, d’une langue auxiliaire simple mais suffisamment internationale, qui pourrait être apprise dans toutes les terres civilisées et librement employée à l’oral et à l’écrit dans tous les domaines de la vie, nous désirons attirer l’attention sur les mérites de l’espéranto et sur sa place dans l’éducation. »

« Cette langue », continue le texte :

« a maintenant passé l’épreuve de quarante-cinq années d’utilisation pratique. Son succès a été démontré dans pas moins de vingt-quatre congrès internationaux, fréquentés en moyenne par plus de 1 000 personnes représentant trente à quarante nationalités. Aucun interprète n’est nécessaire lors de ces réunions ou lors des réunions d’experts locaux qui se tiennent en collaboration avec eux, ni même à d’autres moments. »

Le document fait l’éloge des réussites de la langue :

« Non seulement il existe un usage courant et répandu de la langue pour les voyages, les échanges culturels et les amitiés personnelles, mais ses réussites dans l’usage technique et professionnel sont également considérables. »

Mais aussi :

« Des postes de Maîtres de conférences ont été créés dans les universités de Liverpool, Genève et Cracovie, et des travaux originaux dans cette langue ont été publiés par, entre autres, le Pr. Baudouin sur l’autosuggestion, le Pr. Bovet sur la psychanalyse et le Pr. Collinson sur le langage. »

De même :

« De nombreux ouvrages techniques et scientifiques sont parus, notamment au Japon, dont des articles et traités sur des sujets aussi divers que la résistance des matériaux, la chimie organique et inorganique, et la météorologie. Dans ce même pays est paru un vocabulaire de la pharmacie, et plusieurs dictionnaires techniques dans cette langue ont été publiés en Europe, dont un de près de 4 000 termes, édité par l’association internationale des médecins espérantistes. Dans la seule année 1931, 1 204 conférences et 514 leçons en espéranto ont été diffusées par la TSF dans 21 pays, dont le Japon. »

Le document poursuit en disant que :

« L’association internationale des enseignants espérantistes a, dans ses fichiers, les noms de près de 7 000 enseignants (dans 60 pays) qui connaissent la langue, et plus de 1 000 écoles (dans 32 pays) où des classes d’espéranto ont été mises en place. On y compte des écoles élémentaires et secondaires de Grande-Bretagne et il est intéressant de mentionner que le Bureau de l’éducation d’Angleterre et du Pays de Galles a, depuis de nombreuses années, autorisé les écoles et cours du soir en espéranto lorsqu’une demande en ce sens leur parvenait. »

Les signataires écrivirent : « nous préconisons l’adoption de l’espéranto comme première langue à être étudiée après la langue maternelle, dans les écoles de tous pays, à la fois pour des raisons générales mais également pour les raisons spécifiques qui suivent. »

En voici la liste :

« 1. Une connaissance pratique de l’espéranto peut être obtenue en un temps remarquablement court comparé à celui requis pour les langues nationales, dans lesquelles abondent les difficultés de grammaire, d’expression et de prononciation ; ainsi, son étude est profitable même pour les élèves qui n’ont pas le temps ou les capacités d’apprendre une langue étrangère ordinaire de façon suffisante pour être capable de l’utiliser.
2. Elle teste la capacité linguistique et assiste l’enseignant pour sélectionner plus rapidement les élèves qui peuvent se mettre de manière profitable à l’étude d’autres langues, auxquelles elle est une excellente introduction.
3. Sa grammaire logique, et le fait que sa méthode d’expression soit claire et sans ambiguïté, tendent à développer l’exactitude dans l’emploi des mots.
4. La connaissance de l’espéranto agit non seulement comme un stimulus pour l’apprentissage d’autres langues, mais mène également à une étude plus efficace de la géographie, et notamment un intérêt, acquis par la correspondance, pour la vie des autres pays dans toutes les parties du monde civilisé.
5. La littérature en espéranto, que ce soit en version originale ou en traduction, s’accroît constamment et est déjà suffisante en soi pour justifier une étude de la langue. »

La conclusion indique : « nous nous associons de tout cœur aux efforts qui ont été faits pour introduire l’espéranto comme sujet normal d’enseignement et pour encourager son usage dans les écoles du monde ».

Suivent les signatures de vingt autorités, dont la dernière est, de façon surprenante, celle de :

J.R.R. TOLKIEN, M.A.,
Professeur d’anglo-saxon Rawlinson et Bosworth20), Université d’Oxford.

Ce document est devenu un véritable manifeste, comme on a pu le voir en décembre 1951, lors du Congrès australien d’espéranto de Sydney, au cours duquel Herbert Koppel, de Melbourne, secrétaire de l’Association australienne d’espéranto, montra à un journaliste « un manifeste imprimé en faveur de la langue, signé par environ vingt auteurs et universitaires anglais, parmi lesquels G.P. Gooch, l’historien, et le Professeur J.R.R. Tolkien, professeur d’anglo-saxon à Oxford21) ».

Conclusions

Ce voyage dans l’Oxford du début des années 1930, entre Congrès et espérantistes, n’épuise certainement pas le sujet de la relation entre Tolkien et l’espéranto. Au contraire, il doit être considéré comme le point de départ de recherches nouvelles et plus approfondies sur un aspect bibliographique et linguistique d’un intérêt certain.

On pourrait mettre au jour des informations supplémentaires sur le Congrès d’Oxford de 1933, et peut-être découvrir d’autres liens entre Tolkien, qui aurait pu y prendre part, et la langue inventée par Zamenhof.

On sait aujourd’hui que l’intérêt que portait Tolkien à cette langue commença en 1907, avec une page du Book of Foxrook, aujourd’hui conservé à la bibliothèque bodléienne, se poursuivit pendant la période décrite ci-dessus, avant qu’il ne finisse par changer d’avis. En témoigne une annotation au paragraphe d’ouverture du brouillon de l’essai Un vice secret, ou plus probablement de son projet de révision. Christopher, son fils, écrit dans une note au texte que son père indiqua n’être « plus si sûr [qu’une langue artificielle] soit une bonne chose », ajoutant que « désormais, je pense que nous serions plus susceptibles d’avoir une langue inhumaine sans aucun cuisinier, leur place étant prise par des nutritionnistes et des vendeurs de denrées déshydratées22) ». Et quelques années plus tard mûrit l’idée que les légendes et histoires dépendent de la langue à laquelle elles appartiennent, avec également l'espéranto comme référence. Dans une lettre à un certain M. Thompson, le 14 janvier 1956, Tolkien écrivit :

« C’est au moment même où la Première Guerre m’a rattrapé que j’ai découvert que les « légendes » dépendent de la langue à laquelle elles se rattachent, mais que de la même manière un langue vivante dépend des « légendes » qu’elle transmet par tradition. (Par exemple : que la mythologie grecque dépend bien plus qu’on ne le croit de la merveilleuse esthétique de sa langue, donc de la nomenclature des personnes et des lieux, et moins de son contenu ; même si elle dépend naturellement des deux. Et vice versa. Le volapük, l’espéranto, l’ido, le novial, etc., sont des langues mortes, bien plus mortes que les langues anciennes que l’on ne parle plus, parce que leurs auteurs n’ont jamais inventé aucune légende espéranto.)23). »

En lisant cela, on peut supposer que Tolkien commençait à avoir un rôle ou être reconnu comme référence, à partir de 1932, et que peu de temps après, il aurait « abandonné » la communauté espérantiste pour cultiver sa passion principale. C’est aussi ce que l’appel de 1933 semblerait confirmer. En fait, en 1931, le nom de Tolkien n’apparaît pas parmi les signataires d’un autre appel sur l’espéranto dans l’éducation mondiale, alors que parmi les signataires, huit signeraient l’appel de 1933 à ses côtés (T. Grame Bailey, C.B. Fawcett, J.J. Findlay, Alexandra Fisher, J.C. Flugel, S. Margery Fry, C.W. Kimmins and Nowell Smith)24).

Après 1933, on n’a aucun document ou nouvelle de Tolkien comme espérantiste, et je pense que ce pourrait être un bon point de départ…

Annexe

Suivent ici les signataires de l’appel de 1933 :

THE EDUCATIONAL VALUE OF ESPERANTO

[…]

We heartily associate ourselves with the efforts that are being made to introduce Esperanto as a regular subject of instruction, and to encourage its use in the schools of the world.

T. GRAHAME BAILEY, M.A . B.D., D.Litt..

Reader in Urdu and Hindustani, University of London.

T. C. BAILLE, M.A., D.Sc.,

Principal, West Ham Municipal College.

W. E. COLLINSON, M.A., Ph.D.,

Professor of German and Buchanan Lecturer in Esperanto, University of Liverpool.

CHAS. W. COWEN, M.A.,

President, National Union Teachers, 1929.

C. B. FAWCETT, B.Litt., D.Sc.,

Professor of Economic and Regional Geography, University of London.

J. J. FINDLAY, M.A., Ph.D., M.Ed.,

Honorary Professor of Education, University of Manchester.

ALEXANDRA FISHER, M.A., D.Litt.,

Headmistress. Girls’ County School, Bishop Auckland.

J. C. FLUGEL. B.A., D.Sc.,

Assistant Professor in the Dept. of Psychology, University College, London.

S. MARGERY FRY, M.A., LL.D.,

Late Principal of Somerville College, Oxford.

G. P. GOOCH, M.A., D.Litt.,

Fellow of the British Academy.

G. H. GREEN, M.A., Ph.D.,

Lecturer in Education, University College of Wales, Aberystwyth.

T. GWYNN JONES, M.A.,

Professor of Welsh Literature, University College of Wales, Aberystwyth.

N. B. JOPSON, M.A.,

Reader m Comparative Slavonic Philology, King’s College, London.

C. W. KIMMINS, M.A., D.Sc.,

Lots Chief Inspector, Education Dept.. L.C.C. (1904—23).

JOHN A. PEART, M.A.,

Director of Education, City of Winchester.

EMILY PHIPPS. B.A., BARRISTBR-AT-LAW,

Late Headmistress, Municipal Secondary Girls’ School, Swansea. Late Editor of “The Woman Teacher.”

W. RAMSDEN25), D.M.,

Fellow of Pembroke College, Oxford. Emeritus Professor of Bio-Chemistry, University of Liverpool.

NOWELL SMITH, M.A.,

Formerly Headmaster of Sherbone.

G. A. SUTHERLAND, M.A.,

Principal of Dalton Hall, University of Manchester.

J. R. R. TOLKIEN, M.A.,

Rawlinson and Bosworth Professor of Anglo-Saxon, University of Oxford.

April 1933.

Voir aussi

Sur Tolkiendil

Sur le net

1) Depuis 2001, les bureaux ont été déplacés à Stoke-on-Trent, dans le Stafforshire, au Wedgwood Memorial College de Barlaston, où la bibliothèque Montagu Butler (l’une des plus importantes bibliothèques d’espéranto du monde) avait aussi ses bureaux.
2) En 1929, il s’était tenu à Budapest en Hongrie, et en 1931, à Cracovie en Pologne.
3) Esperanto in the Universities, in « International Language », Londres, vol. VII, mars 1930, p. 52.
4) Les contacts entre les espérantistes et l’Église catholique étaient eurent lieu dès le début. Le 2 juin 1906, Pie X reçut en audience le groupe romain d’espéranto créé par Msgr. Luigi Giambene, renommé avec humour Msgr. Esperanto. Les relations furent consolidées après la Seconde guerre mondiale, quand Pie XII, en 1950, accueillit dans leur propre langue les espérantistes convoqués à l’audience générale de la Basilique St Pierre.
5) Celles publiées ici sont visibles sur le site de l’Österreichische Nationalbibliothek.
6) Listo de Kongresanoj, in « International Language », Londres, vol. VII, octobre 1930, p. 236.
7) La liste des participants, qui comprend nom et prénom, titre académique ou associatif, adresse personnelle, ville d’origine et nationalité, est divisée comme suit : janvier, nos 1—61 ; février, nos 62—126 ; mars, nos 127—239 ; avril, nos 240—319 ; mai, nos 320—428 ; juin, nos 429—521 ; juillet, nos 522—646 ; août, nos 647—1097 ; octobre, nos 1098 à 1211. In « International Language », Londres, vol. VII, janvier—octobre 1930.
8) Dudekdua Universala Kongreso de Esperanto, Internacia Centra Komitato de la Esperanto-Movado, Genève, 1930, 140 p. Je tiens à remercier pour la consultation de ce volume la Bibliothèque Nationale d’Espéranto, qui est la plus grande bibliothèque d’espéranto d’Italie et l’une des plus riches du monde. Fondée en 1972 comme bibliothèque officielle de la Fédération italienne d’espéranto, c’est désormais une collection publique détenue par les Archives Nationales de Massa.
9) Orbis Terrarum, in « The Tablet », Londres, 9 août 1930, p. 193.
10) Gervase Mathew, classe 1905, ami de Tolkien depuis l’enfance, entra chez les Dominicains de Blackfriars en 1934 et y resta jusqu’à l’année de sa mort, en 1976.
11) Il y retournera le 26 octobre 1966, pour y lire son Smith de Grand Wootton lors d’un évènement organisé par l’abbé du couvent dominicain, P. Bede Baylei et par P. Hugh Maycock, directeur de l’institut religieux Pusey House, situé à côté du couvent et sur le même trottoir que le pub Eagle and Child. Wayne G. Hammond et Christina Scull nous rappellent que « même si c’était une soirée très humide, plus de 800 personnes y assistèrent, plus que ce que le Réfectoire ne pouvait accueillir, avec même des gens à l’extérieur, dans le couloir » (Wayne Hammond et Christina Scull, The J.R.R. Tolkien Companion and Guide, vol. I, Chronology, 2006, p. 678—679). L’évènement est également mentionné dans Smith of Wootton Major dans la nouvelle édition publiée par Verlyn Flieger et traduite en italien par Lorenzo Gammarelli aux éditions Bompiani. N.d.t : Cette édition est encore inédite en français.
12) Humphrey Carpenter et Christopher Tolkien, Lettres, Christian Bourgois éditeur, no 99.
13) J. R. R. Tolkien, Un vice secret, in Les Monstres et les critiques et autres essais, traduit par Christine Laferrière, édité par Christopher Tolkien, p. 247.
14) J.R.R. Tolkien, A Philologist on Esperanto, in « The British Esperantist », Londres, vol. XXVIII, no 325, mai 1932, p. 182.
15) En fait, la bibliothèque bodléienne d’Oxford conserve un cahier de notes de Tolkien, le Book of the Foxrook, contenant nombre d’annotations écrites à l’âge de 17 ans, lesquelles montrent que la connaissance et l’intérêt du philologue pour l’espéranto étaient bien plus grands que ce que la lettre laisse entendre.
16) Une langue artificielle créée par le linguistique danois Otto Jespersen, publiée pour la première fois en 1928, dont le vocabulaire se base sur les langues germaniques et romanes, la grammaire sur la langue anglaise, avec une forte influence de l’espéranto et de l’ido.
17) The British Esperantist, Londres, vol. XXIX, no 333, janvier 1933, p. 3.
18) Orbis Terrarum, in « The Tablet », Londres, 25 mars 1933, p. 384.
19) Montagu Christie Butler (Londres, 25 janvier 1884 — 5 mai 1970) était un universitaire, musicien et espérantiste britannique. Il rejoignit la Lingva Komitato, organisme alors en charge de superviser l’évolution de la langue (rôle désormais tenu par l’Akademio de Esperanto) et fut secrétaire de la Brita Esperanto-Asocio de 1916 à 1934.
20) Tolkien fut nommé en 1925 à la chaire d’anglo-saxon Rawlinson et Bosworth — du nom de ses deux bienfaiteurs Richard Rawlinson qui, après sa mort en 1755, donna les fonds pour l’établir, et Joseph Bosworth qui, en 1858, exerça à ce poste et voulut aussi ajouter son propre nom — et l’occupa jusqu’en 1945, date à laquelle il fut rattaché au Merton College.
21) Esperanto Enthusiasts To Hold Conference, « The Sydney Morning Herald », 1 janvier 1952, p. 2.
22) Note 1 de Christopher Tolkien in J. R. R. Tolkien, Un vice secret, in Les Monstres et les critiques et autres essais, édité par Christopher Tolkien, p. 271.
23) Humphrey Carpenter et Christopher Tolkien, Lettres, Christian Bourgois éditeur, no 180, p.327—328.
24) Plusieurs auteurs, Esperanto in the Educational World, in « International Language », Londres, vol. VIII, mai 1931, p. 87.
25) Walter Ramsden D.M. Docteur en médicine (1868—1947), est mentionné dans une lettre que Tolkien écrivit à son fils Christopher le 31 mai 1944, dans laquelle il raconte à son fils qu'il a dîné, le jeudi précédent (le 24 mai), avec « trois anciens qui ont été très affables » : H.L. Drake, Walter Ramsden et L.E. Salt, du Pembroke College, où Tolkien avait une bourse de professeur [Humphrey Carpenter et Christopher Tolkien, Lettres, Christian Bourgois éditeur, no 72, p.124.].