Commentaire concernant « À propos de Christopher »

Marcel Aubron-Bülles - traduit par Jonathan Fruoco - janvier 2013
Notes de lecture : En tant que présentations ou compilations, ces articles sont les plus accessibles à tous les lecteurs. Aucune connaissance sur J.R.R. Tolkien n'est requise.
La version anglaise de ce texte est parue sur le site de Marcel Aubron-Bülles, TheTolkienist.com, le 7 janvier 2013.

Le 7 Janvier 2013, JPB, auteur sur TheOneRing.net, a publié un essai nommé « Concerning Christopher – An Essay on Tolkien’s Son’s Decision to Not Allow Further Cinematic Licensing of His Work ». J’ai été stupéfait par ses hypothèses et je suis rapidement passé du déni à l’acceptation en passant par la colère, le marchandage et la dépression avant de décider d’écrire à ce sujet, et ce pour une simple raison : les hypothèses mentionnées plus haut me paraissent fausses. Bien que j’ai d’abord tenté de répondre à certains commentaires, je me suis vite rendu compte qu’il me faudrait mettre sur papier ma propre position à ce sujet, tant un grand nombre des commentaires présentés trahissent un manque de connaissance sur les points que je voulais clarifier.

J’ai réécrit ce texte sept fois. Cela a commencé comme une diatribe avant de se transformer en quelque chose dont l’approche serait plus raisonnée. J’ai pensé à écrire en vers allitératifs, sans pouvoir aller plus loin que, « Hélas, même si les mots de l’auteur stupéfiaient /La réponse ressemblait quelque peu à un trait ». J’ai rassemblé une simple liste de liens vers des articles, essais et forums traitant de ce même sujet sur les dernières années, mais je me suis arrêté après environ soixante liens. J’avais pensé demander à plusieurs collègues Tolkienistes quelle était leur position là-dessus, mais comme souvent avec Internet de nos jours, une réponse dépend plus souvent de sa rapidité que de l’essence même de la question (malheureusement). J’ai essayé de lire les commentaires, les citant et écrivant des pastiches à leur sujet. J’ai aussi pensé à réaliser un podcast, idée qui m’a le plus suivi et sur laquelle je pourrais bien à l’avenir me pencher dans de telles situations. Toutefois, j’ai finalement opté pour un banal commentaire, probablement pour la plus simple des raisons : sur Internet, ne faites rien de trop long (je n’ai pas vraiment réussi, mais que peut-on faire d’autre avec un problème si complexe ?).

Jeter un doute sur Christopher Tolkien

L’essai commence avec l’assomption que nous autres, en tant que fans, devrions être capables de déterminer si Christopher Tolkien est ou non la personne la plus à même de prendre une décision concernant le futur des droits cinématographiques.

« Mais en tant que fans, on ne s’arrête pas là ! On veut savoir si Christopher prend la bonne décision ; on veut savoir si c’est une décision qu’on peut ou devrait soutenir comme étant la meilleure possible ; et on veut même faire entendre notre opinion quant à savoir si Christopher a, d’un point de vue éthique, le droit de prendre cette décision (même s’il en a, encore une fois, légalement le droit).
Demandons-nous d’abord : est-ce que Christopher est capable de décider du destin de l’œuvre de son père ? Est-ce que son père a fait le bon choix en le choisissant comme exécuteur testamentaire ? »

Rien que dans ces quelques lignes, il y a tellement d’erreurs que même maintenant je tente d’en saisir l’immensité. Oublions pour l’instant que les « fans de Tolkien » et la « communauté Tolkien » ont connu des changements cataclysmiques ces quinze dernières années grâce aux films. Jusqu’en 2000, le moyen le plus simple, le plus rapide et le plus susceptible de mener à Tolkien aurait été les livres et les Tolkien Societies disséminées à travers le monde : cela a complètement changé. D’énormes sites web comme TheOneRing.net sont apparus afin de satisfaire les besoins de ceux aimant les films (et recevant de nos jours des voix en tant que communauté aux people’s choice awards). Il n’y a plus de distinction claire entre les fans à présent, à part probablement entre ceux disant « J’aime que PJ » ou « J’aime que Tolkien », ce qui nous fait oublier ce qu’il y a de l’autre côté de la médaille. Et c’est bel et bien devenu une médaille, en particulier avec ce genre de discussions. Bien que j’apprécie personnellement les films et les effets qu’ils ont pu avoir, je ne vois pas les films comme des adaptations ; ce sont des interprétations. A mon avis, la seule source sur laquelle on peut se reposer tous les jours reste les livres.

Le plus incroyable est que quelqu’un posant des questions sur la vie et l’œuvre de J.R.R. Tolkien puisse remettre en question les efforts de Christopher Tolkien. Même si la réponse offerte dans l’essai est,

« Absolument, la réponse est oui. Avec la possible exception de Rayner Unwin, qui a permit la publication du Hobbit et qui a supporté l’œuvre de Tolkien et entretenu une amitié avec lui de l’âge de 10 ans jusqu’à sa mort, il n’y a eu aucun plus grand fan de l’œuvre de J.R.R. Tolkien que son fils Christopher. »

il ne reste pas moins des traces de la question posée au début. Si vous vous intéressez au Seigneur des Anneaux, au Hobbit et aux autres histoires écrites par son père, et que cet intérêt dépasse le simple stade de la lecture étant enfant, vous ne pouvez ignorer que la personne la plus influente et la plus importante de cette équation est Christopher. Et afin d’éclaircir les choses rapidement : non, je ne suis pas payé par le Tolkien Estate (TE – voir plus bas pour plus d’explications). Je ne suis pas lié à cette organisation d’une quelconque façon. J’ai entendu plusieurs histoires venant de personnes que j’apprécie et que je considère être d’authentiques tolkienistes et qui ont eu des problèmes avec le TE. Les limites qu’ils imposent sur de nombreux sujets tolkieniens sont des obstacles pour beaucoup de personnes désirant écrire sur J.R.R. Tolkien, et je ne suis pas d’accord avec toutes leurs décisions. Cependant, établir un lien entre ces limites et la question de savoir si Tolkien a fait le bon choix en faisant de son fils son exécuteur littéraire est scandaleux.

Et le définir comme un « fan » est une preuve supplémentaire que JPB passe à côté de l’essentiel. Le lien entre Christopher Tolkien et son père est clair, à la fois sur les plans personnel que professionnel. Durant plus de trente ans, il a pris soin de publier des textes liés (et pas seulement) à la Terre du Milieu ; il a transmis des textes à d’autres afin qu’ils soient publiés et travaille encore à la sortie d’un nouveau livre pour 2013, The Fall of Arthur (La Chute d'Arthur). Ce n’est pas un « fanatique » : c’est un universitaire, un fils imprégné de la littérature et de la formation littéraire et professionnelle de son père et qui a hérité d’une tâche que l’on pourrait très bien considérer comme un challenge, si ce n’est un fardeau. Il n’est pas question de fanfiction, d’hystérie, d’intérêt pour des démonstrations publiques d’affection ou d’intérêt pour la gloire et la fortune. Pour lui, il s’agit d’un travail. Un travail des plus demandant et l’accablant d’une formidable responsabilité, tant il a conscience de l’inspiration et du divertissement que de nombreuses personnes ont tiré des écrits de son père. Mais laissez-moi rendre cela suffisamment clair : sans Christopher Tolkien et les efforts du Tolkien Estate, nous ne serions pas là où nous sommes aujourd’hui en termes de recherches et d’appréciation de Tolkien.

Logiques fallacieuses : J.R.R. Tolkien, Peter Jackson et le succès

Bon, s’il y a une déclaration ces dernières années qui est devenue vraiment pénible (étant visiblement fausse), c’est celle-ci :

« Et ben quoi ? au moins le travail de tolkien a 99 milliard de fans en plus grâce aux films. Arrêtez de vous plaindre de l’adaptation en film. Où ils sont tes films chris tolkien ???? au moins peter jackson aime suffisamment les livres pour en faire 6 films au total. laisse nous avoir les autres trucs sur grand écran, sal con pompeux. on dirait un merdeux avec sa boite de biscuits et qui veut pas partager. pathétique. [sic] » (voir les commentaires de l’article de JPB)

Même si j’ai pu moi-même être le témoin de l’influence que les films ont pu avoir sur la communauté (étant co-fondateur de Ring*Con, j’avais attendu ça avec impatience), il reste un tout petit truc que pas mal de personnes ont tendance à oublier, et parce que la plupart d’entre-elles campent durement sur leurs positions je vais l’écrire en gras, trois fois :

J.R.R. Tolkien est l’auteur ayant eu le plus de succès au 20e siècle. J.R.R. Tolkien est l’auteur ayant eu le plus de succès au 20e siècle. J.R.R. Tolkien est l’auteur ayant eu le plus de succès au 20e siècle.

Il y a même un livre appelé J.R.R. Tolkien: Author of the Century. Un très bon livre. Donc, pour être absolument clair : Tolkien a vendu plus de 100 millions de copies du Seigneur des Anneaux et du Hobbit avec que Peter Jackson ne commence à travailler sur son projet. De nouveaux livres de Tolkien sortaient régulièrement (comme Roverandom ou Les Enfants de Húrin) et avec le succès grandissant de la fantasy moderne en tant que genre littéraire (basée à un large degré sur le succès de Tolkien), il n’y avait pas moyen qu’il soit oublié. Et si je voulais écrire un article sur les accolades reçues par Le Seigneur des Anneaux dans plusieurs études parues avec les films, il serait aussi long que celui-là.

C’est vrai, plus de gens ont découvert Tolkien grâce aux films. Je suis d’accord, oui. Et oui, de nouvelles Tolkien Societies ont été fondées et d’avantage de personnes se découvrent un intérêt pour lui. Toutefois, il n’avait pas du tout besoin de cette attention. C’est un bestseller, et il le restera. Et n’oubliez pas une chose : Peter Jackson a construit ce projet en se basant sur le succès de son inspiration. Quel réalisateur ne sauterait de joie à la possibilité de raconter une des histoires les plus populaires ayant jamais été publiées (oui, je sais ce qu’est une hyperbole) ? Qui ne travaillerait pas pour ce genre de succès ? Donc pour résumer : PJ peut remercier J.R.R. Tolkien, et non l’inverse. Pour être juste, bien sûr le succès de la trilogie cinématographique a développé l’intérêt pour Tolkien, comme je l’ai mentionné plus tôt, donc autant l’un que l’autre ont tiré avantage de leurs success story respectives.

Il n’y a une autre logique fallacieuse concernant la question de futures adaptations. Il existe de nombreuses personnes qui considèrent évidemment Peter Jackson comme le réalisateur le plus lumineux, créatif et remarquable qui ait jamais existé. Pour être de nouveau clair avec vous: je suis tout à fait d’accord sur le fait que Peter Jackson soit l’un des esprits créatifs le plus passionné et atypique que possède l’industrie du cinéma. Je le classerais même plus haut sur l’échelle « avancée technologique » et « évolution de la production d’un film », mais il ne fait aucun doute que lui et son équipe sont des professionnels aimant leur travail. Bon sang, j’ai même fait parti d’une pyjama party la nuit des Oscars© quand le Retour du Roi (trilogie cinématographique du Seigneur des Anneaux) a gagné onze Oscars. On se tapait dans les mains, on les applaudissait, on a consommé une grande quantité de boissons pas forcément sans alcool. J’ai adoré ça.

Pourtant, ça ne veut pas dire que cette trilogie soit la meilleure adaptation. En fait, je ne les considère pas vraiment comme des adaptations, mais plutôt des fanfictions portées sur le grand écran. Incroyablement divertissantes, fascinantes, émouvantes (je suis pas encore sur pour Le Hobbit, mais il reste deux films), vraiment très bien fichues ; mais la meilleure adaptation ? Pas du tout.

Regardez les nouvelles versions de Sherlock Holmes qu’on a en ce moment : des films d’actions avec R. Downey Jr/ Jude Law ; la série de la BBC avec Benedict Cumberbatch et Martin Freeman ; et la prochaine série CBS Elementary. Est-ce que vous les considéreriez comme de vraies adaptations littéraires ? Pas moi. La série de la BBC, Sherlock, est sans conteste l’une des meilleures adaptations du personnage génial de Sir Arthur Conan Doyle ; les films sont juste bourrés d’action. Et la même chose pourrait être dite de la trilogie de Peter Jackson : amusante, divertissante, superbe image, acteurs géniaux. Rien de mal là-dedans, mais ce n’est pas une adaptation littéraire au sens strict du terme (j’ai étudié en profondeur les « puristes » des films et des livres dans cet article).

Alors pourquoi personne ne s’est jamais demandé : est-ce que la Tolkien Estate laisserait quelqu’un d’autre faire ces films, particulièrement si Peter Jackson n’était pas impliqué ? Il y a une raison si Terry Pratchett a récemment fondé une compagnie de production pour ses œuvres, et si J.K. Rowling a demandé clairement à avoir son mot à dire sur les films Harry Potter (influence sur le résultat final). C’est quelque chose que la famille Tolkien n’a pas (voir plus bas pour la complexité légale du sujet). Et si Christopher Tolkien juge que l’industrie cinématographique, particulièrement pour son traitement des contes de Tolkien, n’est pas un partenaire créatif avec qui il aimerait travailler, pourquoi le devrait-il ? La seule raison pour laquelle on est confronté à ce problème est que les films ont été tournés, et que ce n’est pas prêt d’arriver à nouveau dans les cinq prochaines années : on est coincé avec eux.

Situation légale

J’aimerais souligner le fait que je ne suis pas avocat et que, non, je n’ai pas vu le contrat (ce qui est au cœur du problème), mais sur le site web officiel de Middle-Earth Enterprises (la société de Saul Zaentz, l’homme derrière l’accord de licences actuellement), on peut lire la courte déclaration suivante :

« Middle-earth Enterprises possède les droits exclusifs mondiaux pour les films, le merchandising, la scène et autres droits de certaines œuvres de J.R.R. Tolkien, incluant Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit. Nous avons produit et octroyé des licences pour des films, des productions théâtrales et des produits dérivés basés sur ces écrits de Tolkien durant plus de trente-cinq ans. »

Certaines des licences octroyées actuellement sont référencées sur une autre page, on y trouve notamment la comédie musicale, la Hobbit Stein Collection, Electronic Arts et bien sûr, Warner Bros. Interactive. Donc en gros, ME possède les droits de tout ce qui est lié au SdA/Hobbit, sauf pour ce qui concerne les textes eux-mêmes, comme par exemple les livres. C’est la base de luttes légales qui se déroulent depuis des années : Middle-earth Network a du déclarer « Sauvez la Comté » quand il est devenu évident que des centaines de noms et de titres comme « LA COMTÉ » deviendrait des marques déposées (pour une liste complète, voir United Stated Patent and Trademark Office). Le Tolkien Estate poursuit la Warner pour ses droits (excellente critique du système hollywoodien consistant à « se faire du fric rapidement et de laisser les avocats s’occuper du reste » d’Eric Wecks pour WIRED) et les poursuit depuis des années : une partie de l’argent ira au Tolkien Trust, un organisme caritatif fondé en 1977 (l’année de publication du Silmarillion) afin de soutenir des bonnes causes. D’ailleurs, si on se fie aux chiffres de 2009, New Line Cinema aurait versé un acompte. Et les choses ne se sont pas simplifiées quand Gene Deitch, de Tom & Jerry, a avoué il y a quelques temps que les droits des films n’auraient pu être prétendument transmis que par une arnaque qui était plus ou moins légale en 1966… enfin, si on veut. Vous pouvez lire son délicieux article ici, sans oublier l’illustrateur tchèque Adolf Born.

Au final, on en revient à ça : Middle-earth Enterprises (autrefois connu comme Tolkien Enterprises) ne peut pas utiliser quoi que ce soit, à part le SdA/Hobbit. Tout le reste dépend soit du Tolkien Estate ou des maisons d’éditions comme HarperCollins, ou directement de Christopher Tolkien, qui n’est pas seulement l’éditeur de publications comme L’Histoire de la Terre du Milieu, mais aussi du Silmarillion, des Enfants de Húrin et prochainement de The Fall of Arthur (La Chute d'Arthur). Point à la ligne. Oh, le Tolkien Estate n’a pas chômé non plus, puisqu’avant la sortie des films ils ont fait de TOLKIEN une marque déposée, incluant la signature du Professeur. Juste pour s’assurer d’avoir la main dans les batailles légales des années à venir. Un cauchemar.

Du coup, ce n’est pas si simple que ça d’un point de vue légal. Et ce n’est pas l’Estate se battant contre le « mal » en se basant sur une logique absurde : leur but est de protéger l’héritage littéraire de J.R.R. Tolkien, et non de se soucier de méga-contrats de merchandising avec des gens voulant se faire quelques dollars rapidement sur le dos de l’auteur ayant eu le plus de succès au 20e siècle.

Le Silmarillion et le mauvais medium pour l’adapter.

A cause du succès des trilogies, beaucoup de personnes espèrent que d’autres histoires de Tolkien seront adaptées en films. C’est parfaitement compréhensible : qui ne voudrait pas voir Morgoth Bauglir sur son trône sous le Thangorodrim ? Qui ne voudrait pas apercevoir Gondolin ou suivre la victoire tragique des Enfants de Húrin ? Cependant, étant donné que les droits du Silmarillion sont uniquement en possession du TE, cela n’arrivera probablement jamais connaissant la réaction de la famille aux films. Mais est-ce qu’on doit vraiment en rester à un ou plusieurs films ? C’est juste une parenthèse, mais je suis convaincu que des histoires aussi complexes que celles de Tolkien (particulièrement parce qu’elles ne s’attardent pas particulièrement sur le concept répandu d’arc narratif – et oui, je sais que quelqu’un va vouloir montrer que j’ai tort ;)) ne devraient pas être compressées dans un film mais plutôt dans une série tv. Désolé, c’était juste une parenthèse, mais je suis stupéfait du nombre de personnes s’accrochant à l’idée de film. C’est pas nécessaire. Retour à notre sujet.

L’interview du Monde et son détournement.

Il est extrêmement difficile de parler des détails d’une traduction. La théorie de traduction moderne ne favorise pas l’idée qu’il existe de bonnes et de mauvaises traductions (excepté, bien sur, quand une erreur a été commise), mais que les traductions peuvent être appréciées de différentes perspectives, dépendant de la matière originale, de l’époque de la traduction, de l’arrière-plan culturel, etc. Et c’est un sujet particulièrement sensible lorsque le langage source (dans ce cas le français) est utilisé de façon aussi splendide par un auteur (Raphaëlle Rérolle) qui est à la fois une journaliste accomplie et une critique dans un des principaux journaux français, Le Monde. (Juste au cas où vous vous le demanderiez, oui je suis traducteur indépendant).

Une traduction anglaise a fait surface quelques temps après sa publication originale (7 juillet 2012) et a visiblement été transmise quelques temps après à un autre site web. A l’heure d’aujourd’hui, les sites web soutenant les films de Peter Jackson ont commencé à creuser dans un ou deux paragraphes majeurs, présentant en apparence Christopher Tolkien disant, « Tolkien est devenu un monstre, dévoré par sa propre popularité et absorbé par l’absurdité de notre temps. »

Imaginez un journal de classe mondiale de cette dimension, publiant une édition spéciale du Monde Culture avec de magnifiques photos (notamment, et oui, des chaises de Tolkien ;)) racontant l’histoire de la destruction d’un héritage littéraire. Expliquant comment l’auteur et son œuvre se retrouvent enfouis sous un engouement de plusieurs milliards de dollars, menant à la répétition infinie des mêmes images, encore et encore. Vous avez remarqué combien de gens ont peint Viggo Mortensen en tant qu’Aragorn ces dernières années ? Avant les films, les peintres choisissaient leur propre Aragorn, maintenant il n’y en a apparemment plus qu’un (parfois). Quand on lit l’article, on éprouve de la sympathie pour les causes de Christopher Tolkien et on ignorerait avec joie n’importe quel blockbuster hollywoodien pour que des gens lisent vraiment les livres.

C’est évidement une expérience personnelle, mais je ne suis pas le seul à ressentir ça. Et ce que beaucoup craignaient s’est réalisé après la « traduction » (je n’ai pas pu déterminer qui a traduit cet article et ne le considérait donc pas comme officiel), à savoir que dans le monde anglophone, aucun des détails, des complexités et des problèmes derrière le travail que la famille Tolkien voudrait réaliser, n’a survécu. Et c’est ça que j’appelle un « détournement ».

Pour tous ceux qui demanderaient que je propose une meilleure traduction, je tiens à dire : je l’ai fait avec d’autres tolkienistes la nuit après la publication. Toutefois, à cause de contraintes légales et financières il n’a pas été possible de publier notre version. Et on ne le fera pas, à moins que les détenteurs des droits en question ne nous le demandent. Si vous connaissez quelqu’un en France, demandez-lui de vous donner un aperçu des différences. Elles sont nombreuses.

Et ensuite ? Que peuvent faire les fans ? Que devriez-vous faire ?

Bon. Il n’y a vraiment pas grand chose à faire, légalement. C’est un vrai champ de mines sur lequel se battent des compagnies et des avocats manipulant des milliards de dollars. Rien que le croquant standard ne pourrait affronter, même si on vit maintenant dans l’âge des médias sociaux et des campagnes virales conduites par les médias quand les fans ne sont pas contents. Mais il y a sûrement une ou deux choses à laquelle la nouvelle communauté pourrait penser.

A tous ceux qui ont finit par apprécier Tolkien grâce aux films : bienvenue ! C’est génial de vous avoir parmi nous. Je vous en prie, ne vous sentez pas mis à l’écart en tant que « fans » quand des discussions de ce genre font surface. Quand on en vient aux histoires que l’on aime, cela génère forcement beaucoup de passion. Ceux d’entre-vous voulant voir d’autres films peuvent envoyer des lettres à toutes les sociétés concernées. Utilisez des sites comme TheOneRing.net ou Middle-earth Network pour faire entendre votre voix. Mais soyez conscient que tout le monde ne partage pas l’avis que les trilogies cinématographiques soient les meilleures qui existent. En fait, il y a pas mal de personnes, dont des universitaires spécialistes de Tolkien et des experts du monde entier, qui auraient souhaité voir une meilleure adaptation littéraire. Si vous vous contentez d’un film divertissant, pourquoi vous prendre la tête ? Contentez-vous d’en profiter. Je n’ai pas besoin d’un Gandalf en peluche, mais je ne dirais pas non pour autant à un Smaug en peluche.

Pour moi, la plus grande joie reste d’avoir pu rencontrer des milliers de personnes venues des quatre coins du monde et partageant le même intérêt pour la vie et les œuvres de feu le Professeur John Ronald Reuel Tolkien, CBE. Ils ont tous un parcours différent, ont découvert la Terre du Milieu grâce aux livres, aux films, aux jeux ; il existe tellement de façons maintenant d’apprécier ces magnifiques histoires. Mais au final, il n’y a qu’un commencement : les livres. Lisez-les. Ils valent plus que tout l’or du monde pour moi, et je sais que c’est aussi le cas pour d’autres.

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