J.R.R. Tolkien, Auteur du Siècle

9791028101381.jpgJ.R.R. Tolkien, Auteur du Siècle

Titre original J.R.R. Tolkien: Author of the Century
Auteur Tom Shippey
Publication 2002
Éditeur Houghton Mifflin
Titre français J.R.R. Tolkien, Auteur du Siècle
Traduction Aurélie Brémont
Publication 16 novembre 2016
Éditeur Bragelonne

Présentation (inspirée de la quatrième de couverture anglaise)

De récents sondages ont montré que J.R.R Tolkien est « l'auteur le plus influent du siècle » et Le Seigneur des Anneaux « le livre du siècle ». Appuyant ces résultats, l'éminent médiéviste et érudit en fantasy Tom Shippey nous fait maintenant part d'un compagnon fabuleux aux travaux de J.R.R. Tolkien, centré particulièrement sur Bilbo le Hobbit, Le Seigneur des Anneaux et Le Silmarillion. L'âme du livre consiste en l'examen du Seigneur des Anneaux en tant que carte linguistique et culturelle et que réponse à la signification du mythe. Il présente un argument unique pour expliquer la nature du mal, et donne aussi au lecteur une vision du niveau sans précédent requis pour construire une histoire si riche et complexe. Shippey examine aussi Bilbo le Hobbit, expliquant la relation anachronique entre les Hobbits et le monde épique de la Terre du Milieu, et montre l'importance fondamentale du Silmarillion dans les travaux de Tolkien. Il offre également un regard lumineux sur d'autres travaux moins connus, et sur leur lien avec la vie de Tolkien.

Extrait sur Google Livres

L'avis des lecteurs

Spooky (janvier 2017)

Ce titre un brin provocateur, c'est Tom Shippey, spécialiste du médiéval et philologue, tout comme Tolkien, qui l'a utilisé. Comme lui, il a enseigné à Leeds et Oxford, avant de partir enseigner aux États-Unis. Cet ouvrage, réalisé en 2000, a l'ambition de passer en revue toute l’œuvre du professeur sortie jusque-là.

On commence par le Hobbit, et l'invention de la Terre du Milieu, au travers de l'inspiration narrative (les contes nordiques), les noms, mais aussi la façon dont l'ouvrage a été reçu par la critique de l'époque. Vient ensuite le Seigneur des Anneaux, gros morceau largement analysé ici. Shippey met l'accent sur le Conseil d'Elrond, moment de révélation des personnages et véritable rampe de lancement de l'histoire. Les différents niveaux de langage (entre Hobbits, ou encore lorsque c'est un roi qui s'exprime, etc.) sont également évoqués, par exemple entre le Rohan et le Gondor. Shippey met par ailleurs l'accent sur la technique de l'entrelacement, que n'a pas inventée Tolkien, mais qu'il a portée à un niveau difficilement atteignable. On trouve même dans l'ouvrage un schéma indiquant les différentes avancées de l'intrigue, ou plutôt DES intrigues. Tout un chapitre est consacré à la personnification du Mal, incarné par l'Anneau Unique et les Spectres de l'Anneau. Et qui dit Mal dit concepts positifs, pour faire la balance : la chance et le courage. Des valeurs qui amènent le chercheur sur le terrain de l'allégorie, qu'elle soit volontaire ou pas puisque les situations et les dilemmes rencontrés par les personnages du Seigneur des Anneaux rappellent plus ou moins les évènements — parfois tragiques — qui ont jalonné la première moitié du XXème siècle. Shippey évoque ensuite brièvement deux figures secondaires de SdA, à savoir Saruman et Denethor, qu'il qualifie respectivement de technologiste et de fonctionnaire, du fait de leurs caractéristiques et de leurs attributs.

L'auteur s'attache ensuite à analyser la poésie, plus présente qu'on ne le croit dans le Seigneur des Anneaux ; il rapproche cette tradition de celle de Shakespeare et de Milton, principalement. In fine, il essaie de placer le roman le plus connu de Tolkien dans une case, en termes de genre. Il convoque pour ce faire l'échelle inventée par le critique Northrop Frye, selon laquelle il y a cinq genres littéraires, définis uniquement par la nature de leurs personnages. Bien évidemment, le Seigneur des Anneaux échappe à toute classification, puisqu'il puise dans de nombreuses caractéristiques.

Thomas Alan Shippey s'attaque ensuite au Silmarillion, l’œuvre de cœur de Tolkien. Entre maturation (extrêmement) lente, dimension mythique et complexité presque extrême, c'est une œuvre toute particulière. Il passe ensuite en revue les « œuvres courtes », dans lesquelles il classe Feuille, de Niggle, Smith de Grand Wootton, ou encore ses poèmes ; toutes des œuvres contenant peu ou prou des éléments d'autobiographie. Un éclairage fort intéressant que j'aurais aimé avoir lorsque j'ai lu ces écrits il y a une bonne vingtaine d'années…

Dans une longue postface, Shippey s'intéresse aux suiveurs et aux critiques, mais fait avant tout le parallèle avec James Joyce, considéré lui aussi comme un auteur majeur du XXème siècle. En ce qui concerne les critiques, Shippey réduit leur haine viscérale envers Tolkien à une sorte d'incompréhension crasse, couplée à une méfiance native pour le roman populaire, c'est à dire qui rencontre d'emblée un grand succès en termes de ventes.

Tolkien a suscité de multiples vocations littéraires, avec des succès divers. Il cite l’Épée de Shannara, de Terry Brooks, Thomas Covenant, de Stephen Donaldson, ou encore the Weirdstone of Brisingamen, d'Alan Garner, œuvre la moins connue du lot, mais qui semble valoir le détour.

En conclusion, Shippey explique que ce qui a rendu la lecture de l’œuvre de Tolkien aussi aisée est sa dimension métaphorique, entre les personnages fantastiques et les situations qui rappellent des évènements du XXème siècle. Il n'a pas inventé un genre, mais l'a véritablement remis au goût du jour, en le formalisant, en le réécrivant pour les lecteurs de son temps. Et c'est ce génie qui en a fait la cible des critiques, eux qui n'arrivaient pas à le mettre dans une case, ou même le voyaient comme une menace face à l'establishment.

L'ouvrage se termine sur une dizaine de pages de références bibliographiques, entre œuvres de Tolkien, avec la mention des traductions en français lorsqu'elles existent et exégèses de son œuvre. Il y a également de nombreuses mentions d'ouvrages de références en termes de critique et d'analyse de l’œuvre de Tolkien. A noter qu'en ce qui concerne le Hobbit et le Seigneur des Anneaux, l'éditeur Bragelonne s'est aligné sur la nouvelle traduction réalisée par Daniel Lauzon, achevée cette année pour le SdA. Il faut dire que le directeur de la collection Essais est Vincent Ferré, qui dirige les traductions de Tolkien chez l'éditeur historique Christian Bourgois. Cela a dû faciliter les passerelles en termes de traduction de l'ouvrage de Shippey.

Au final, un ouvrage très intéressant, considéré comme une référence par les tolkienistes, mais qui a un seul défaut, c'est qu'il part un peu dans tous les sens. J'ai eu l'impression, parfois que dans un chapitre consacré à un sujet relativement précis, Shippey rajoutait un passage sur tel point de philologie. Pas inintéressant en soi, mais un peu déstabilisant pour le lecteur.

Vous pouvez retrouver ce commentaire ainsi que de nombreuses autres critiques sur le blog de Spooky, Ansible.

Anfauglir (décembre 2007)

Author of the Century est sans doute l'un des meilleurs livres sur l'œuvre du professeur Tolkien qu'il m'ait été donné de lire. Érudition, rigueur, mais aussi une grande clarté et un style très attractif ne sont que quelques-unes des belles qualités de cet ouvrage. Plutôt mal connu des francophones, il faut savoir que Tom Shippey n'est pas n'importe qui parmi les tolkiendili anglo-saxons. Originaire de la même région que Tolkien, ayant fréquenté la même école, Shippey partage aussi avec lui le même amour des langues. Il a ainsi enseigné l'ancien anglais à l'université de Leeds, occupant la même chaire que Tolkien (reprenant d'ailleurs ses syllabi), puis il fut professeur de cette matière à Oxford même. Les deux hommes ont pu ainsi se côtoyer, notamment dans le cadre de leurs carrières académiques. Les nombreuses qualités des ouvrages de Tom Shippey font qu'il est vu aujourd'hui comme l'un des plus éminent étudiants de l'œuvre de Tolkien de langue anglaise.

Dans ce livre, Shippey s'attache particulièrement à montrer la place essentielle qu'occupe la fantasy dans la littérature du XXe siècle (et sans doute du XXIe également). Ce n'est pas un hasard si Le Seigneur des Anneaux a été plusieurs fois acclamé comme le livre du siècle par des générations de lecteurs. Shippey décortique les relations entre les événements tragiques du siècle (notamment ses deux guerres mondiales, qui ont marqué la vie de Tolkien), et les auteurs romanesques, dont Tolkien. Il montre ainsi la fantasy comme une forme nouvelle de littérature, apparentée, mais différente du conte traditionnel, qui permet aux hommes du XXe siècle d'exprimer notamment un sentiment nouveau du mal et de la mort. Rien n'est plus pareil après l'horreur de la mort industrialisée des deux guerres mondiales, de même que les héros de la fantasy auront des destinées bien différentes de leurs lointains cousins, plus courtois, des romans arthuriens par exemple. Chacun sait que Tolkien attachait une importance très particulière à la représentation, et au sens du mal dans ses œuvres, je dirais que Shippey nous donne ici quelques clefs de lecture très pertinentes pour en comprendre la signification.

Shippey montre également que, si Tolkien n'est pas l'inventeur du genre, il se place au tout premier rang de ses auteurs de fantasy. Et ceci en raison de son attachement tout particulier aux détails, à la vraisemblance et à la structuration remarquable de ses histoires (au sens romanesque), toutes choses que Tolkien mentionne lui-même comme fondamentales dans son essai sur le Conte de Fée. Shippey expose alors, d'une façon très originale, les grandes qualités littéraires de l’œuvre de Tolkien, en s'attachant particulièrement à Bilbo le Hobbit, au Seigneur des Anneaux et au Silmarillion (et aux Contes et Légendes inachevés dans une moindre mesure).

L'un des atouts du livre est que, tout au long de son analyse, Shippey montre avec quelle maestria Tolkien sait faire usage de sa passion des langues et de son expertise académique pour faire de son œuvre une réussite unique en son genre. Partageant avec Tolkien les mêmes centres d'intérêts (sinon la même expertise) et enseignant les mêmes matières, Shippey nous offre une analyse particulièrement fine de l'usage que son illustre prédécesseur a fait de nombreux textes et sources historiques qu'ils connaissent tout deux particulièrement bien (je pense à Beowulf par exemple).

Ce travail remarquable d'analyse et de mise en perspective de l’œuvre exceptionnelle de Tolkien font à mon avis de J.R.R. Tolkien: Author of the Century une grande réussite et un livre incontournable pour celui qui cherche à regarder « l'envers du décor », ou à découvrir un peu l'âme de la Terre du Milieu. J'ajouterai que dans le monde d'aujourd'hui, qui n'est pas moins barbare que celui du siècle passé, ce livre prend aussi une signification extrêmement actuelle. Comme un éclairage renouvelé qui peut nous faire penser que Tolkien pourrait être aussi (déjà) un auteur du XXIe siècle.

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tolkien/sur-tolkien/tom_shippey_-_tolkien_auteur_du_siecle.txt · Dernière modification: 23/04/2021 19:51 par Zelphalya
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