Le dialecte mithrimin du sindarin

 Trois Anneaux
Roman Rausch – Juin 2010
traduit de l’anglais par Damien Bador
Articles de synthèse : Ces articles permettent d’avoir une vue d’ensemble du thème traité mais ils nécessitent une bonne connaissance des principales oeuvres de J.R.R Tolkien.
« Il [Beren] parlait sindarin d’une certaine manière (probablement dérivée du sindarin septentrional) ; mais l’usage hésitant et dialectal qu’il en faisait offensait les oreilles du Roi Thingol. »1)

Introduction

Dans des remarques dispersées à travers diverses sources postérieures au Seigneur des Anneaux, Tolkien mentionne une variété du sindarin, le sindarin septentrional ou dialecte mithrimin. L’objectif de cet article est de rassembler et d’analyser les différents détails phonologiques dont nous disposons à ce propos. Un article à ce sujet fut précédemment écrit par Richard Derdziński2) en 2001, et le présent travail coïncidera nécessairement en partie avec celui-ci, mais une grande quantité de matériaux nouveaux a été publiée depuis et doit désormais être prise en compte.

Histoire interne et externe

Dès le tout début, il était prévu que la langue noldorine soit riche en dialectes divers. Le compte-rendu du PE 14, p. 61-62 mentionne les dialectes de Mithrim, Gondolin, le parler fëanorien de Nargothrond et plusieurs autres variétés. Le « Lhammas » mentionne la division du noldorin en parlers de Mithrim (peuple de Fingolfin), de Gondolin (peuple de Turgon), Nargothrond (peuple de Felagund) et parler de Himring (peuple de Fëanor et de ses fils)3). « Les Étymologies » listent deux mots de ce dialecte fëanorien, maið « pâle, ambré, fauve » (noldorin meið)4), d’où vient également le nom Maiðros au lieu de Meiðros ; et nef « renforcer, amortir » pour le nold. nedhw (signifiant initialement « balafré »).

Mais dans la conception postérieure au Seigneur des Anneaux, les Ñoldor ne parlent plus noldorin mais quenya, tandis que l’ancienne langue noldorine réapparaît sous la forme du sindarin, parlé par les Sindar ou Elfes-gris de la Terre du Milieu. Le sindarin est divisé en trois dialectes principaux : doriathrin ou sindarin méridional (parlé en Doriath), sindarin occidental (parlé sur la côte)5) et sindarin septentrional (parlé en Mithrim, à Hithlum et à Dor-Lómin). Des divisions plus fines incluent le parler d’Ossiriand, le sindarin du nord-ouest et du nord-est6). Le sindarin septentrional est aussi appelé « la langue de Mithrim » ou simplement le « mithrim »7)8). La formation adjectivale « mithrimin » est mentionnée en PE 17, p. 134. Dans l’histoire interne, il périt au cours de la guerre contre Melkor et laissa peu ou pas de traces, quoiqu’il puisse être détecté dans des noms propres ou des toponymes (Dor-Lómin, Hithlum). Tolkien mentionna aussi que « certains de ses mots et formes finirent par être incorporées dans le sindarin du Sirion »9). Le sindarin classique des âges ultérieurs, que l’on rencontre par exemple dans le Seigneur des Anneaux, est principalement dérivé du sindarin occidental, puisque les survivants de la guerre contre Melkor trouvèrent refuge sur les côtes, tandis que les autres parties du Beleriand étaient détruites.

Chose intéressante, le sindarin septentrional devint effectivement la langue de la maison de Fëanor, mais désormais parce que les Ñoldor rencontrèrent d’abord les Sindar de Mithrim et adoptèrent leur parler. Ainsi, l’ancien fëanorien nef est en accord avec les changements phonologiques esquissés pour le sindarin septentrional, mais la préférence pour ai au lieu de ei ne l’est plus, car les deux diphtongues apparaissent comme dernière syllabe des mots sindarins. Voir aussi le compte-rendu détaillé dans l’article « Northern dialect of Sindarin ».

Phonologie du mithrimin

« M » non lénifié

Références : PE 17, p. 108, 128, 131, 132, 134 ; WJ, p. 400 ; VT 41, p. 10

L’absence de la lénition m > v est une caractéristique fréquemment mentionnée du sindarin septentrional, et est aussi qualifiée de « différence majeure » avec le sindarin occidental10). Par exemple :

  • arāmē « Oromë » > sind. sept. Arum, sind. occ. arauv > araw11)
  • q. Tyelkormo « vif emporté », adapté en sind. sept. sous la forme Celegorm ; le sind. occ. aurait été *Celegorf12)13)
  • lāmina « #échoïque, faisant écho » > sind. sept. lǭmin, sind. occ. lǭ́m̃en > loven14)
  • χīþilọ̄mē > sind. sept. hīthlūm > Hithlum, sind. occ. hithlũṽ > Hithlũ15)

Dans cette notation, ũ indique une voyelle nasalisée, dont la nasalité fut plus tard perdue en sindarin. De même, indique probablement une spirante bilabiale précédée d’une voyelle nasalisée. Noter que Hithlum est un pur mot noldorin dans « Les Étymologies » (LUM- ; LRW, p. 370), avec le nold. lhum « ombre » < *lumbē (q. lumbë).

Au travers d’une communication personnelle, j’ai découvert la possibilité que le m non lénifié soit une explication possible pour le -m- médian du nom Boromir. Le PE 17, p. 134, affirme que « le Peuple de Bëor des Edain fut influencé par les Finrodiens [?], en particulier pour les noms propres, au cours de leur résidence dans les hautes terres. »16) Tant Boromir que Belemir sont des noms de la Maison de Bëor17) et pourraient donc à l’origine être des noms du sindarin septentrional, adaptés dans le Sud et par les Edain au final. Dans « Les Étymologies », Boromir est un nom purement noldorin, dérivé du vieux noldorin Boronmíro (BOR-). Dans une note de bas de page de l’Appendice F du SdA, Tolkien l’explique comme une forme mixte de sindarin et de quenya.

« S » initial non lénifié, « -h- » médian préservé

Références : PE 17, p. 134

Il existe en fait une série complète de formulations qui se remplacèrent successivement :

« Le s initial demeura et le h médian »18).

On aurait ainsi probablement sad « […] endroit, lieu »19) > sind. occ. #i had, sind. sept. #i sad. La phrase de Tolkien semble inachevée, mais pourrait vouloir signifier que le h médian perdure aussi. Cela semble se référer à la contraction advenant lorsque h se trouve entre voyelles, comme pour le passé de sav- « avoir » : ahawy > aw « #n’avait pas » (SAM- ; PE 17, p. 173), tandis qu’en sind. sept., on s’attendrait donc à #ahǭm, #ahum.

« S non lénifié initialement et médialement »20).

Cela implique apparemment le sind. sept. #i sad, #asǭm, #asum.

« S non lénifié initialement ; kh > h initialement et médialement »21).

Maintenant, -s- semble à nouveau lénifié médialement (sind. sept. #i sad, #ahǭm, #ahum), mais kh > h impliquerait une absence de mutation du h, e.g. eld. com. khēr > sind. occ. i·chír22), sind. sept. #i·hír.

« S non lénifié initialement ; h (préservé) médialement »23).

Par ailleurs, le –kh- médian donne apparemment -ch- /χ/ (mentionné plus loin sur la même page), donc i·chír ; mais probable lénition médiale –s- > –h- sans autre changement, i.e. #ahǭm, #ahum.

Le nom bëorien Barahir contient un -h- médian non lénifiée, qui pourrait s’expliquer par une adaptation tirée du sindarin septentrional (la conception « kh > h initialement et médialement », de même que Boromir et Belemir (voir ci-dessus).

« pp, tt, kk » > « p, t, k » (mais « ph, th, kh » et « ps, ts, ks » > « f, th /þ/, ch /χ/ », comme en sindarin occidental)

Références : PE17, p. 134

Il s’agit d’un développement remarquable, vu que les consonnes sourdes intervocaliques ne se retrouvent nulle part ailleurs dans la branche celtique des langues inventées par Tolkien (goldogrin, noldorin, ilkorin tardif, sindarin). Mais il existe en gallois un développement similaire, où bb, dd, gg deviennent pp, tt, cc, e.g. Cad-deyrn > Catéyrn pour Catteyrn, wyneb-bryd > wynepryd « contenance »24). Nous pouvons construire certains exemples :

  • ap-pata- « marcher derrière, sur un chemin ou un sentier25) > sind. sept. #apad- « suivre », #Apadon « homme, suiveur » ; sind. occ. aphad-, Aphadon
  • quettā « mot »26) > sind. sept. #pet « mot » ; sind. occ. peth
  • rokkō« cheval rapide pour la monte »27) > sind. sept. #roc « cheval », #rocon « cavalier » ; sind. occ. roch, rochon28)

Combinaisons nasale + occlusive sourde inchangées « mp, nt, nc » ; « lt » inchangé

Références : mp, nt, nc : VT 42, p. 27 ; PE 17, p. 132, 134. lt : PE 17, p. 132, 133, 134

Dans une note à l’essai « Les rivières et collines des feux de Gondor » (1969), Tolkien affirme que « les formes canthui [4ème], enchui [6ème], tolthui [8ème] sont celles du dialecte sindarin méridional adopté par les Noldor. Dans le dialecte septentrional (qui périt au cours de la guerre contre Morgoth), np, nc, mp étaient demeurés inchangés. »29) Dans une autre note, cantui, canhui « quatrième » ; encui, enchui « sixième »30) sont cités, avec cantui et encui semblant être des exemples du sindarin septentrional où –nt- et –nc- demeurent inchangé. Un autre exemple est cantu à centu, avec une signification peu claire31). La combinaison lt reste aussi inchangée, quoique lp, lc, rt, rp, rc deviennent les spirantes lph, lch, rth, rph, rch32). Par conséquent, nous nous attendrions aux sind. sept. #toltui « 8ème », #maltorn < malt « or » + orn « arbre »33). La conception de cette période peut être résumée comme suit :

Vieux sindarin Sindarin septentrional Sindarin occidental
mp mp primitif -mf- [f bilabial], tardif -mh-, final -mp
nt nt primitif --, tardif -nh-, final -nt
nc nc primitif -χ-, tardif -ŋh-, final -nc
lt lt primitif --, tardif -lh-, final -lt

Tolkien utilise nch, ñx pour ŋχ et ñh pour ŋh. Dans cette notation, -mh-, -nh-, -ŋh- représentent les nasales sourdes longues, et -lh- le l sourd long.

Il existe aussi une conception antérieure différente : une note du 13 décembre 1962 décrit le développement suivant :

Vieux sindarin Sindarin septentrional Sindarin occidental, méridional et ossiriandais
mp médian -mf-, final mp médian -mh-, -m-, final -mp
nt médian -nth-, final -nt (tardif) médian -nh-, -nn-, final -nt
nc médian -ŋch- >- ̄ch- (tardif), final -nc médian -ŋh-, -ŋg-, final -nc
lt médian -lth-, final -lt médian -lh-, -ll-, final -lt

Tolkien utilise ngh pour h. Dans cette notation, - ̄ch- signifie que la voyelle précédente reçoit un allongement compensatoire lorsque la nasale vélaire ŋ est perdue (cf. sind. sept. dancen, dachen34), néanmoins sans allongement). Les spirantes sourdes médiales deviennent ici des –m-, –nn-, ­–ŋg-,ll- voisés « à moins qu’elles soient encore suivies par une syllabe accentuée ». Chose intéressante, on retrouve la même structure en gallois, e.g. *brénhin > brénin, pl. brenhínı̯aeth « roi »35). Dans cette conception, mp, nt, nc, lt ne sont pas préservé en sindarin septentrional, mais deviennent universellement des spirantes au cours de la période vieil sindarine. Mais parmi tous les dialectes, le sindarin septentrional retient les spirantes et garde ainsi une saveur plus archaïque. Les combinaisons lf < lt, rth < rt, rf < rp, rch < rc demeurent spirantes dans les deux dialectes.

« Ā » long > « ǭ »

Références : WJ, p. 414 ; PE 17, p. 133, 134

La voyelle longue ā devient universellement ǭ en sindarin, une voyelle longue entre /a/ et /o/ (comme dans l’anglais dawn, law). Le sindarin septentrional conserve ce son, qui devient une diphtongue au en sindarin occidental, se transformant souvent en o par la suite (WJ, p. 414). Dans les positions inaccentuées, ǭ semble devenir u en sindarin septentrional, mais il se pourrait que cela soit dû à la labiale m le suivant, d’où ́ǭm > um, avec peut-être une développement différent s’il est suivit par d’autres consonnes. Nous avons comme exemples :

  • nābā « creux » > sind. sept. nǭv, nǭf ; sind. occ. nauv > naw, nov-36)
  • arāmē « Oromë » > arǭmæ > sind. sept. Arum ; sind. occ. > araum(a) > araum̆, arauv > Araw37)
  • lāmina « #échoïque, faisant écho » > sind. sept. lǭmin > lomin ; sind. occ. lǭ́m̃en > loven38)

Le changement lǭmin > lomin pourrait indiquer l’ adaptation de ce mot en sindarin classique dans le toponyme Dorlomin ou Dor-lómin39), le sindarin septentrional authentique restant lǭmin.

Noter que WJ, p. 400 mentionne qu’en sindarin septentrional, la « diphtongation du ō […] n’avait pas lieu »40), mais il s’agit probablement d’une erreur de lecture pour ǭ – qui seul faire sens dans le contexte spécifique de ce passage (traitant de l’évolution de arǭmæ) et dans le contexte de la phonologie du sindarin en général, où ō devient ū.

Probablement « au » > « ô »

Références : PE 17, p. 133

Quelques variantes du nom du « Tertre des tués », apparaissant sous la forme Haudh-en-Ndengin dans le Silmarillion existent en PE 17, p. 133 (voir aussi WJ, p. 79 ; LRW, p. 363). Parmi ces formes, il nous faut probablement identifier Hauð i nenghin comme du sindarin occidental, présentant la longue nasale vélaire sourde ngh < nk. La forme Hôð indencin doit donc apparemment être considérée comme du sindarin septentrional, puisqu’elle montre la préservation d’un agglomérat -nc-. La variante Hôđ i ndechina, avec un génitif infléchi en –a pourrait être du doriathrin (chose intéressante, il s’agit d’un suffixe génitif singulier, peut-être du fait que la pluralité est exprimée par la mutation vocalique, cf. -(i)on, PE 17, p. 97). Au moins à l’époque des « Étymologies », le génitif infléchi est un apanage du doriathrin, e.g. Nauglamîr, nold. mîr na Nauglin, Nauglvir > Nauglavir41). Alternativement Hôđ i ndechina pourrait être une forme sindarine septentrionale parallèle – noter que le sind. sept. dancen, dachen « tués » est mentionné sur la ligne au-dessus. Si Tolkien n’avait pas changé entre-temps la dérivation de hauð « tertre, tombe, tombeau », il devrait toujours dériver de khagda (LRW, p. 363 ; KHAG-), avec un g vocalisé. Ainsi, il semble que le sindarin septentrional changeait au (de a + consonne ou d’un aw originel) en ô, mais pouvait encore présenter le développement au, dérivé par exemple de ou.

Absence de mutation en « –a »

Références : PE 17, p. 133, 134

La mutation en –a du sindarin est causée par la présence d’un –a final, et des influences i > e, u > o dans la syllabe précédente. Tolkien affirme qu’en sindarin septentrional, « u et o et i/e demeurèrent distincts – aucune mutation en –a du i »42). Nous n’avons qu’un exemple pour le i, mais pouvons en construire pour le u :

  • lāmina « #échoïque, faisant écho » > sind. sept. lǭmin ; sind. occ. loven
  • kuldā « creux » > sind. sept. #cull ; sind. occ. coll 43)

Cependant, cette règle semble être à nouveau annulée avec le développement suivant :

  • dankĭnā « tué » > sind. sept. dancen, dachen ; sind. occ. daŋχen > danghen > dangen

là où l’on se serait attendu au sind. sept. #dancin ou #dencin.

Combinaisons avec « –w » final

Références : VT 42, p. 8-9

Vieux sindarin Sindarin septentrional Sindarin occidental
-tw > -dw -b -du
-dw > -ðw -v -ðu
-thw > -þw -f /f/ -þu
-nw -m -nu

Tolkien dit que le q. Finwë aurait été adapté en sindarin sous la forme Fim, mais qu’il fut en fait sindarisé en –fin, comme dans Curufin44). PM, p. 344, confirme que Fim aurait été du sindarin septentrional, et que les autres variétés auraient donné Finu. Dans « Les Étymologies », le changement phonique -ðw > -v était déjà attribué au dialecte fëanorien, e.g. nidwō « renforcer, amortir » > v. nold. nidwa > nold. nedhw, fëanorien nef. Ici, -f est probablement une manière d’orthographier /v/. Pour éviter la confusion, on pourrait utiliser –ph pour /f/ et –v pour /v/. Il n’y a guère d’exemples où l’on trouve les combinaisons décrites ci-dessus en noldorin ou en sindarin :

  • matwā « #affamé » > sind. sept. #mab, sind. maud, madu45)
  • catwā « modelé, formé » > sind. sept. #cab ; sind. cadu (KAT- ; LRW, p. 362-363) [nold. cadw]
  • khithwa « nébuleux, obscure, vague » > sind. sept. #hiph ; sind. hethu (KHIS-, KHITH- ; LRW, p. 364) [nold. hethw]
  • *ʒanw- > sind. sept. #am ; sind. anu « une personne masculine (des Hommes ou des Elfes), un animal mâle » (ƷAN- ; LRW, p. 360) [nold. anw]
  • wanwē « mort, acte de mourir » > sind. sept. #gwam, sind. gwanu (WAN- ; LRW, p. 397) [nold. gwanw]

Noter par exemple que pathmā devient pathwa > pathw « niveau, espace, pelouse » en vieux noldorin (PATH- ; LRW, p. 380), mais s’il faut inclure ce terme dans le sindarin ultérieur, le changement m > #v > w ne serait pas universel et la forme mithrimine serait #pathm (avec peut-être la forme ultérieure bisyllabique ? #pathum). La même chose s’applique à khithme > nold. hithw « brouillard » (sind. sept. #hithm, ? #hithum).

Rétraction de l’accent (?), conservation de « -nd- » après l’accent (?)

Références : PE 17, p. 133

Dans ce qui semble être des notes hâtives, Tolkien mentionne une « rétraction de l’accent en s[eptentrional]46). Les exemples qui suivent sont Góndolind, sind. Gonnólen, Gonðolen, Gondolen. Il semble s’agir d’une tentative d’expliquer le nom Gondolin comme un mot du sindarin septentrional : apparemment, le sindarin septentrional conserve l’accent sur la première syllabe (gónd(o)línd > Góndolind) et nd n’est pas changé dans la syllabe suivante, non accentuée. Mais l’évolution en-dehors de Mithrim aurait été #gónd dólen > #Gon(d)-ðólen > Gonnólen, avec un –nn- médian. La signification des différentes compositions dans cette note reste relativement obscure – Góndolind est manifestement « #roc de musique » (comme expliqué plus bas sur la même page), mais Gonnólen doit être « #roc caché », avec dolen « caché » (cf. DUL- ; LRW, p. 355). On aurait pu s’attendre à une comparaison des différents développements de la même forme primitive.

Idées reprises à des langues antérieures

Edouard Kloczko remarqua il y a longtemps que le dialecte du sindarin septentrional semble incorporer certains aspects de l’ilkorin des « Étymologies », pour lequel il n’existait plus de place dans le Légendaire après que Tolkien eut décidé que les Elfes-gris devraient parler sindarin à la place.47) Par exemple, le changement ilkorin ā > ō plutôt que l’apparition de la diphtongue au comme en noldorin, et le fait de laisser m non lénifié. La même chose advient cependant en doriathrin48) :

  • tāro > ilk. tôr « roi » ; nold. taur (TA- ; LRW, p. 389)
  • *lāma > dor. lóm « écho », lómen « échoïque, faisant écho » (LAM- ; LRW, p. 367)

À cette époque, Dorlómen, Ered Lómin sont en fait des noms doriathrins noldorisés Lómendor, Lóminorthin, tandis que le Dor-lómin ultérieur est un nom adapté du sindarin septentrional. En noldorin, tinmē « étincelle, éclat » devient tinw, mais tim en ilkorin (TIN- ; LRW, p. 393). En sindarin, TIN- donne ultérieurement tim « étoile, étincelle »49). Kloczko suggéra qu’il pourrait s’agir d’un emprunt au sindarin septentrional, mais il se pourrait en fait que Tolkien ait simplement changé sa conception phonologique et que tinmē donne désormais régulièrement le sind. tim (essentiellement par mutation nasale, cf. Annúminas « Tour de l’Ouest »50), à l’évidence < annûn + minas). Dans tous les cas, la correspondance du sind. occ. –nu au sind. sept. –m est attestée séparément en VT 42, p. 8-9.

Le siège de Gondolin (© John Howe)

Mais il semble que Tolkien ait aussi introduit en sindarin septentrional de nouvelles caractéristiques datant d’étapes encore plus reculées, en particulier du goldogrin. Ce dernier laisse m et s non lénifiés51), bien qu’ils apparaissent rarement en position intervocalique. L’elfique primitif ā devient également ō en goldogrin, et la finale –nw > –m. Par exemple :

  • ausin « riche »52)
  • amabwed « avoir la main »53)
  • *āra > ôr « sable sec »54) ; q. āra
  • enwa > em « (adj.) nommé, appelé par son nom »55), cf. enu-, enwa- « suis appelé, suis nommé », enweg « homonyme »

Il y a aussi une hésitation dans le « Gnomish Lexicon » entre les combinaisons comme mf, nth, ngh ; lf, lth, lch ; rf, rth, rch et mp, nt, nc ; lp, lt, lc ; rp, rt, rc. Il semble que Tolkien ait parfois décidé pour l’un ou l’autre motif ; et parfois pour les deux. Par exemple :

  • tl.p- > talpa- « soutenir, appuyer, étayer », talpon « un pilier mince »56)
  • dolfa « une taupe »57), cf. q. nolpa
  • anthin, pl. of ant « joue »58), cf. q. anta
  • lunta « un navire »59)
  • tent « orteil », pl. tenthin, tentin60)

Voir « Historical Phonology of Goldogrin » pour plus de détails.

Le changement –nw > –m apparaît aussi en noldorin premier : hen(n) « œil », pl. hinn mais duel him < *henwi61). Le noldorin premier semble aussi avoir eu une prédilection pour les u devant m, qui apparaissent toujours comme voyelle de connexion à la première personne exclusive du pluriel au présent, e.g. glathrum « #nous polissons », madum « #nous mangeons », dagum « #nous tuons »62) (cf. sind. sept. Arum).

Sources citées et articles connexes

Voir aussi

Sur Tolkiendil

Sur le net

1) Version originale : « He [Beren] spoke Sindarin after a fashion (probably derivedfrom North Sindarin); but his halting and dialectal use of it offended the ears of King Thingol. » PM, p. 369
3) LRW, p. 177
4) VT 45, p. 30
5) N.d.T. : que l’on pourrait sans doute également appeler falathrin, adjectif attesté dans les Étym. : LRW, p. 349
6) PE 17, p. 131-134
7) WJ, p. 400
8) WJ, p. 411
9) Version originale : « some of its words and forms eventually became incorporated in Sindarin of Sirion ».
10) PE 17, p. 128
11) , 37) WJ, p. 400
12) , 44) VT 41, p. 10
13) PM, p. 353
14) , 15) , 31) , 34) , 38) PE 17, p. 133
16) Version originale : « the Beor-folk of the Edain were influenced by the Finrodians[?], especially in personal names, during their residence in the highlands. »
17) WJ, p. 230-231
18) Version originale : « Initial s remained and medial h ».
19) VT 42, p. 20
20) Version originale : « S unlenited initially and medially ».
21) Version originale : « S unlenited initially; kh > h initially and medially ».
22) VT 41, p. 9
23) Version originale : « S unlenited initially; h (preserved) medially ».
24) J. Morris-Jones, An Elementary Welsh Grammar §127
25) WJ, p. 387
26) LRW, p. 366
27) Let. nº 297
28) UT, p. 313
29) Version originale : « the forms canthui [4th], enchui [6th], tolthui [8th] are those of the southern Sindarin dialect adopted by the Noldor. In the Northern dialect (which perished in the course of the war against Morgoth) nt, nc, mp had remained unchanged. » VT 42, p. 27
30) VT 42, p. 10
32) PE 17, p. 132
33) VT 42, p. 27
35) J. Morris-Jones, An Elementary Welsh Grammar §88, 90, 126
36) , 43) WJ, p. 414
40) Version originale : « diphthongization of ō […] did not occur ».
41) LRW, p. 375
42) Version originale : « u and o and i/e remained distinct - no a-mutation of i » PE 17, p. 134
45) PE 17, p. 148
46) Version originale : « accent retraction in N[orth] » PE 17, p. 133
49) PE 17, p. 22
50) UT, p. 419
51) GL, p. 7
52) GL, p. 20
53) , 58) GL, p. 19
54) GL, p. 62
55) GL, p. 32
56) GL, p. 69
57) GL, p. 30
59) GL, p. 55
60) GL, p. 70
61) PE 13, p. 122
62) PE 13, p. 126-130
 
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