Middle English ‘Losenger’

En septembre 1951, l’Université de Liège accueillit un congrès sur les langues germaniques et romanes. Parmi les organisateurs se trouvait le Professeur Simonne d’Ardenne et parmi les intervenants, son ancien professeur d’Oxford : J.R.R. Tolkien. Au cours de cette session, Tolkien présenta en conférence plénière une étude sur l’étymologie du mot moyen-anglais losenger (lit. « un flatteur, un escroc ») dont l’origine remonterait au vieux français. Il y explique ainsi que le vieux français comporte deux losenge homonymes : 1) le losenge géométrique et 2) losenge un dérivé de losengier dont le champ lexical est celui du mensonge ou de la louange médisante (plutôt que celui de la flatterie comme c’est le cas de losenger). Il retrace l’histoire de ce mot dans les langues romanes, par son ascendance au latin laudare, qui donna notamment le champ lexical de la louange en français ; mais également dans les langues germaniques, par la relation que ce mot entretient avec le norrois lausung ou le vieil-anglais lēasung « mensonge, duperie ». Il existe donc deux étymologies possibles, la romane avec un champ lexical de la louange et la germanique avec un champ lexical du mensonge ; la proximité euphonique aurait permis aux deux de ne faire qu’un. Finalement, Tolkien remonte plus loin, estimant que la forme du mot en vieux français ne correspond pas à la graphie française et qu’il s’agit probablement d’un emprunt antérieur au vieil anglais (recensant au passage les relations entre le losenge 2 et de nombreuses langues européennes : le provençal, le gaulois, le franc, le vieil haut-allemand ou encore le gotique) ; losenger est donc un mot moyen-anglais emprunté du vieux français losengier qui l’a lui-même emprunté du vieil-anglais lausing- « mentir ».